La bataille de Hodeida s’intensifie, avant les grandes négociations

La bataille de Hodeida s’intensifie, avant les grandes négociations
La bataille de Hodeida s’intensifie, avant les grandes négociations

Julie KEBBI – Lorient lejour

Alors que Hodeida fait l’objet de combats depuis le début du mois, les violences se sont intensifiées hier entre les houthis et les forces progouvernementales, appuyées par la coalition menée par Riyad et Abou Dhabi qui mettent les bouchées doubles avant l’expiration du délai de trente jours imposé par les États-Unis pour mettre un terme à la guerre du Yémen. « Une opération militaire a commencé et les forces armées nationales ont avancé vers le nord et l’ouest de la ville de Hodeida, progressant sur tous les fronts avec le soutien de la coalition arabe », a déclaré hier le gouvernement du président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi dans un communiqué. « D’intenses combats ont lieu en ce moment », précise le texte. Selon des sources médicales, les combats hier ont fait 110 morts parmi les rebelles et 22 morts parmi les forces loyalistes, a rapporté l’AFP qui précise que cela porte le bilan des combattants morts dans les deux camps à 382 depuis le début du mois.Cette ville portuaire yéménite est aux mains des rebelles depuis 2014 et représente un point stratégique par lequel transite près de 70 % de l’aide humanitaire grâce à son accès direct à la mer Rouge. Mercredi, « les forces de l’armée yéménite ont réussi à prendre le contrôle des entrées de Hodeida », et deux leaders houthis, Mohammad Abdallah Hamid al-Saqal et Walid Hassan Ali, ont été tués dans les combats, a rapporté la chaîne à capitaux saoudiens al-Arabiya. Selon le Conseil norvégien pour les réfugiés, « des civils ont fait état de frappes aériennes, de la présence de jets volant à basse altitude et d’hélicoptères Apache, d’obus de mortier et de missions à la périphérie de la ville et à moins de 5 kilomètres du port principal du pays » depuis le début de l’offensive. « Au moins 18 civils ont été tués et 17 autres blessés par des frappes aériennes, des tirs d’artillerie et des mines antipersonnel dans les gouvernorats de Hodeida et Hajjah mercredi, faisant suite à des frappes massives et des bombardements sur des fermes, des usines, des camions, des maisons et des marchés à travers les gouvernorats. »

« Les Américains leur ont forcé la main »

Avec la reprise de l’offensive, la coalition et les loyalistes « pensent peut-être changer le rapport de forces sur le terrain avant de négocier », affirme un diplomate ayant requis l’anonymat contacté par L’OLJ. Selon lui, « ils seront acculés à négocier, ils n’ont plus le choix. Les Américains leur ont forcé la main ». Les Occidentaux ont accentué la pression ces dernières semaines sur Riyad pour l’application d’un cessez-le-feu, depuis l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi au consulat de son pays à Istanbul, le 2 octobre dernier. « Dans trente jours, nous voulons voir tout le monde autour d’une table de négociation sur la base d’un cessez-le-feu, d’un retrait de la frontière, puis sur l’arrêt du largage de bombes (…) », a déclaré la semaine dernière le secrétaire américain à la Défense, James Mattis.

« Les Saoudiens ne sont pas prêts à faire de compromis sur Hodeida », estime pour sa part Maged al-Madhaji, cofondateur et directeur exécutif du Centre de Sanaa pour les études stratégiques, contacté par L’Orient-Le Jour. « Ils veulent retirer les houthis de l’équation car ils menacent leur accès à la mer Rouge », note-t-il. « Si les houthis perdent le contrôle sur Hodeida, ils seront seulement considérés comme un groupe rebelle qui vit dans les montagnes et ils ne poseront pas une menace majeure au niveau international », explique M. al-Madhaji. Dans ce cas, les acteurs prorégime et la coalition « assisteront aux négociations de manière plus sereine car les houthis ne pourront pas jouer la carte de Hodeida », précise-t-il. « Ce sont surtout les Émiratis qui veulent contrôler Hodeida, comme ce fut le cas à Aden », complète le diplomate. « Ils ont des visées géostratégiques de grande importance : ils veulent contrôler les ports. Il y a eu comme une division de travail avec les Saoudiens qui les ont laissés se battre à Hodeida et Aden », poursuit-il.

Rebelles intransigeants

Face à la détermination des loyalistes et de la coalition à prendre le contrôle de la ville, le chef des rebelles, Abdel Malek al-Houthi, a déclaré mercredi dans une allocution télévisée qu’ils « ne se rendraient jamais ». « Est-ce que l’ennemi pense que pénétrer dans telle ou telle région ou saisir telle ou telle région signifie que nous allons être convaincus que nous devons rendre le contrôle (de la ville) ? » a-t-il fustigé. Les houthis « mènent des attaques intensives en tirant des obus sur les positions reprises par les troupes loyalistes dans le sud de la ville », a rapporté hier l’AFP, citant des responsables militaires progouvernementaux. Selon l’agence, « les rebelles ont en outre affirmé avoir réussi à couper les voies d’approvisionnement de leurs adversaires dans quatre secteurs de la province de Hodeida », sans que l’information n’ait été confirmée par des sources loyalistes. Les Yéménites se trouvent à nouveau pris en étau et payent le prix fort alors que le pays se trouve au bord de la famine. Selon le haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, près de 445 000 personnes avaient dû fuir la ville lors de l’offensive de la coalition en juin dernier. « Si le nombre de personnes restées à Hodeida est difficile à quantifier, le HCR redoute que les habitants qui ont besoin de fuir ne soient pas en mesure de le faire. Ils sont piégés par les opérations militaires qui confinent davantage la population et coupent les voies de sortie », a déclaré Shabia Mantoo, porte-parole de l’agence des Nations unies.

Les combats dans la ville portuaire avaient été déjà mis en pause cet été pour permettre au rapporteur spécial de l’ONU pour le Yémen, Martin Griffiths, de tenter de ramener les parties concernées autour de la table des négociations. L’initiative s’était soldée par un échec en septembre dernier suite au refus des rebelles de se rendre à Genève pour des consultations organisées par l’ONU. « Quand un émissaire onusien propose une date, il n’arrive jamais à avoir les protagonistes autour de la table à la date prévue, c’est normal », relativise le diplomate. La nouvelle offensive sur cette ville stratégique pourrait toutefois compromettre les efforts de l’émissaire onusien pour trouver un compromis entre les parties. Signe de la difficulté de sa tâche, le porte-parole des Nations unies, Farhan Haq, a déclaré jeudi que le but de l’envoyé spécial était de tenir des consultations d’ici à la fin de l’année. Des propos qui viennent trancher avec ceux de M. Griffiths qui espérait encore la semaine dernière pouvoir réunir les parties au conflit d’ici à un mois.

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